Un maraîchage sans âge…

Si les maraîchers occupent aujourd’hui une place à part à Colmar : quartier éponyme, festivités de la saint-Fiacre (leur saint patron), ce n’est bien sûr pas sans raison... L’Histoire les a en effet conduits sur ces terres qui nous entourent, sachant aussi – malgré l’extension urbaine – les y faire rester.

Colmar au jardin, ça date !

Avant même l’élévation de Colmar au rang de ville, les archives font état de la présence d’une culture maraîchère, mentionnant le lieu-dit de la Krutenau (« la plaine à choux ») dès 1209 ! C’est dire à quel point les terres de notre ville attirent, depuis longtemps, les jardiniers… Leur corporation (Gärtner) figure d’ailleurs en bonne place, en 1356, dans la première liste des 20 corporations de la ville.

Ces ancêtres des maraîchers vendent alors leurs produits près de la collégiale Saint-Martin, puis au niveau de l’actuelle église Saint-Matthieu. On en retrouve aussi la trace sur les marchés de Mulhouse, Guebwiller et Vieux-Brisach. Leurs choux, radis, navets, carottes, et surtout leurs oignons, jouissent à l’époque d’une excellente réputation.

Le terroir colmarien offre en effet des conditions idéales à l’activité maraîchère. En 1552, dans sa Cosmographie Universelle, le savant humaniste Sebastian Münster indique, en décrivant Colmar, que « la plaisante cité est située en une plaine fertile ayant de tous côtés une grande quantité de vins et de blés ». Et, suite de son analyse : « La terre est principalement bonne à porter froment, oignons et jardinages ».

Céréales, raisins et légumes y poussent, il est vrai, en abondance, et il n’est pas rare que, sur certaines parcelles, des propriétaires développent conjointement activités viticoles et maraîchères : ce sont les fameux « Rabseppi » colmariens.

Quand les maraîchers fleurirent…

À la fin du 19e siècle, la profession connaît un développement inédit : en 1869 est créée une société d’horticulture et de viticulture qui, à partir de 1892, compte une section spécifique consacrée au maraîchage. Colmar, alors ville de garnison intégrée au 2e Reich allemand, voit sa population et donc sa demande en produits de la terre fortement augmenter. Les surfaces cultivées de la Speck, la Semm, les Noehlen, la Silberrunz, la Niederau sont alors agrandies et accueillent les maisons des maraîchers, qui viennent s’installer au plus près de leurs cultures. C’est – vous l’aurez compris – le début du quartier des maraîchers ! Vers 1910, la production a ainsi été multipliée par dix par rapport à 1880. Impressionnant, non ?

Edition #260 - Juin 2018