Lady liberty

La Liberté éclairant le monde
Chef d’œuvre d’une vie et symbole universel

Deux épisodes en particulier précèdent la naissance du projet qui a abouti à la construction de la « Statue de la Liberté ».

Il y a tout d’abord le voyage en Egypte d’octobre 1855 à juin 1856. Auguste Bartholdi n’a alors que 21 ans et cherche encore sa voie. A cette époque, un projet pharaonique passionne la communauté internationale : la future construction du canal de Suez sous la direction de l’ingénieur français Ferdinand de Lesseps. Dans le même temps, Auguste Bartholdi découvre l’art monumental de l’Egypte ancienne. De cette conjonction naît l’inspiration, quelques années plus tard, d’une statue monumentale pour l’entrée du canal. Brandissant un flambeau, une femme drapée et couronnée, symboliserait l’alliance entre le génie de l’Antiquité et la civilisation moderne. Avec l’appui de Lesseps, il propose son projet aux autorités égyptiennes en 1869, en vain. Mais l’idée est née et ne le quittera jamais.

Le second épisode, sans doute embelli par la légende, a lieu en 1865. Il s’agit d’un dîner à Paris qui réunit plusieurs personnalités libérales et républicaines, dont Auguste Bartholdi et Edouard de Laboulaye, académicien influent et grand admirateur des Etats-Unis. Lors de ce rendez-vous mondain, l’idée survient donc d’un cadeau pour marquer le centenaire de l’indépendance américaine qui se profile pour l’année 1876. Bartholdi emporte l’adhésion de ses interlocuteurs avec le projet d’une statue monumentale symbolisant la liberté du peuple sur l’oppression.

Dès lors, Bartholdi sera habité par sa grande œuvre. Au lendemain du choc de 1871, l’impulsion décisive survient. Bartholdi embarque pour les États-Unis. Dès son arrivée en rade de New-York, il remarque l’île de Bedloe et a la certitude d’avoir trouvé l’emplacement idéal de la statue : c’est la future Liberty Island. Il entame alors un travail titanesque de lobbying entre France et États-Unis.

Aidé par ses relations, Edouard de Laboulaye au premier chef, convainc une à une toutes les personnalités qui vont lui permettre de se lancer dans le projet en 1875, et de le mener à son terme dix ans plus tard en 1886. Hommes politiques, diplomates, artistes, penseurs, patrons d’industrie, francs-maçons… et même deux Présidents des Etats-Unis. Il lui faudra mobiliser beaucoup de monde dans les hautes sphères françaises et américaines pour rassembler les fonds aussi nécessaires que démesurés et pour vaincre tous les obstacles techniques et règlementaires. Il mobilisera également les foules et les opinions grâce à l’appui de nombreux journalistes et au lancement de plusieurs souscriptions. Il aura recours à des méthodes de promotion utilisées encore aujourd’hui : exposition de pièces détachées de la statue avec visite payante, vente d’objets souvenirs, etc.

Démontée à Paris en 1885 et soigneusement répertoriée dans plus de 200 caisses, la Statue de la Liberté quitte Rouen le 21 mai 1885 à bord de la frégate l’Isère. Elle arrive à New-York le 19 juin, accueillie par une armada de fête. Pourtant, le financement de son piédestal n’est pas totalement bouclé. Le patron de presse Joseph Pulitzer lance alors une dernière souscription qui permettra enfin de procéder au remontage. L’inauguration a lieu le 28 octobre 1886 dans une liesse populaire à la hauteur de l’extraordinaire cadeau fait au peuple des États-Unis par le peuple français.



On en connaît aujourd’hui la fabuleuse destinée : la Statue de la Liberté est devenue le symbole universel de la liberté des peuples à décider pour eux-mêmes. Premier contact visuel de millions de migrants avec le nouveau monde durant des décennies, la force symbolique de cette œuvre est unique.

En 1886 déjà, sa renommée éclipse celle de son auteur. De retour en France, Auguste Bartholdi est élevé au rang de commandeur de la Légion d’Honneur. Loin de se reposer sur ses lauriers, il continue à travailler pour de nombreuses villes, comme il l’a fait durant la construction de Lady Liberty. Il faut citer notamment son autre chef-d’œuvre, lui aussi largement occulté par la statue qui sera pourtant inaugurée après lui : le Lion de Belfort.

 

C’est ainsi, en tant qu’artiste respecté et admiré, qu’Auguste Bartholdi s’éteint à son domicile de la rue d’Assas, à Paris, le 4 octobre 1904, loin de son glorieux chef-d’œuvre.

Des ingénieurs célèbres pour une construction hors normes

Au lancement de la construction, l’architecte Eugène Viollet-le-Duc collabore avec Auguste Bartholdi qui est un de ses anciens élèves. à sa mort en 1879, Gustave Eiffel lui succède et opère des changements décisifs sur la structure métallique de la statue. Elle doit être souple et légère, mais suffisamment robuste pour supporter, dans toutes les conditions climatiques, les plaques de cuivre qui en forment l’enveloppe.

Poids :

 

4 millions de visiteurs par an

 

Son ongle le plus grand est large de 33 cm et long de 65 cm

 

 

Du chantier monumental à l’objet souvenir

La construction de la statue de la Liberté a été opérée dans les ateliers de la cuivrerie d’art Gaget, Gauthier et Cie, à Paris. C’est ainsi qu’avant d’éclairer le nouveau monde, la statue a peu à peu été montée à Paris jusqu’à en dominer les célèbres toits de zinc.

Ces mêmes ateliers ont produit de nombreux objets de communication qui ont permis à Auguste Bartholdi de populariser son projet tout en rassemblant des fonds auprès des Français et des Américains. Chez ces derniers, les mini-statuettes de l’atelier parisien auront un tel succès que le nom Gaget est resté dans le langage courant sous sa forme phonétique « gadget » !

Le Lion de Belfort : l’autre chef-d’œuvre dédié à la Liberté

Grâce à l’héroïque résistance de sa population et de sa garnison, Belfort, également emportée dans le tourbillon de la guerre, échappe au sort réservé à l’Alsace-Lorraine en 1871.

Aussitôt le spectre de l’occupation éloigné, la municipalité décide d’élever un monument à la mémoire des victimes du siège. Auguste Bartholdi est contacté en 1872 et, très vite, identifie la roche de granit qui domine la ville pour y implanter un lion colossal. Cette œuvre, « ce n’est ni une victoire, ni une défaite qu’elle doit rappeler, c’est une lutte glorieuse ». Suite à diverses péripéties, le Lion de Belfort (22 mètres de long sur 11 mètres de haut) ne sera totalement achevé qu’en 1879. Le succès est tel qu’une réplique en a aussitôt été érigée à Paris, sur la place du colonel Denfert-Rochereau qui avait mené le siège. Fier, serein, puissant et déterminé malgré l’adversité, le Lion de Belfort exprime magnifiquement la conception qu’avait Bartholdi de la liberté. Pour cette œuvre monumentale, l’artiste patriote et engagé ne réclama aucune rétribution.

Un homme marié à son art

Des amours de Bartholdi, on ne sait que peu de choses…

C’est aux États-Unis qu’il rencontre sa future épouse, alors qu’il s’emploie à rassembler les adhésions et les participations pour Lady Liberty. Nous sommes en 1876 et il a 42 ans. L’heureuse élue s’appelle Jeanne-Emilie Baheux, mais se fait appeler Emilie-Jeanne Baheux de Puysieulx. Elle se dit plus jeune que Bartholdi de huit ans, alors qu’en réalité, elle en a cinq de plus.

Née en France, orpheline à six ans, elle a été adoptée par Madame Walker, une riche Canadienne et a vécu avec elle à Paris jusqu’en 1871, puis à Montréal. Elle vit d’une petite rente que les héritiers Walker lui ont consentie.

Malgré toutes les craintes que ce rapide portrait pourrait susciter, Jeanne se comportera en épouse fidèle, discrète et affectueuse. Elle réussira même à trouver sa place, sans heurts, auprès de son époux hyperactif et de sa bien-aimée mère. Du reste, après sa mort, elle respectera scrupuleusement ses volontés.

Edition #3 - Décembre 2015