Le coup de cœur des bibliothèques
Camus, l’art de la révolte.
Abd Al Malik - Fayard, 2016
Qu’est ce qui fait qu’un gamin de cité se choisit comme grand frère, ombre protectrice et guide spirituel, le grand écrivain Albert Camus ?
Des points communs : un père absent (celui de Camus disparaît à la guerre de 14), une enfance pauvre, une mère courage, l’expérience de la longue maladie et du temps qu’elle offre à la lecture, la culture et l’école républicaine, l’amour du foot… et la découverte, à 12 ans, de l’Étranger.
Abd al Malik, rappeur, écrivain et réalisateur de la cité du Neuhof à Strasbourg, nous transmet une vision toute personnelle de Camus, poète, romancier et intellectuel engagé, dont les textes l’accompagnent depuis l’adolescence. Une lecture au long cours, souvent reprise, qui a construit et accompagne toujours l’artiste. Grâce à Camus, il découvre que le savoir est une arme, que l’homme est fait pour résister à ce qui l’écrase (le mythe de Sisyphe), que l’artiste est responsable et solidaire. Avec lui, il choisit la vie alors que la mort plane dans les caves, critique les groupes de rap de sa jeunesse, s’assume comme artiste qui dira « le désespoir et la beauté du monde ». Comme lui, il reste fidèle à son milieu et à une double culture française et africaine.
Des extraits de textes de Camus et ceux d’Abd al Malik alternent. De son amour pour Camus, il fera aussi un spectacle en 2013, « l’art et la révolte », joué au grand théâtre d’Aix.
Une belle déclaration d’amour et de vie pour celui qui, « comme un tuteur, permet à l’éternel exilé, à tous les déracinés, de pousser droit ». Après la lecture, écouter « Gibraltar » et se rappeler la rencontre avec Abd al Malik au festival du livre de Colmar « On lirait le Sud ».